Conférence de presse de la CEDH 2025
Le président de la CEDH, Marko Bošnjak, tiendra une conférence de presse le vendredi 31 janvier 2025 de 16 heures à 17 heures. À cette occasion, il présentera le bilan des activités de la Cour et les statistiques pour l’année 2024. Le président ainsi que Marialena Tsirli, greffière de la Cour, se tiendront ensuite à la disposition des journalistes pour répondre aux questions qui leur seront posées. Les journalistes qui souhaitent y participer peuvent envoyer un courriel avant le 27 janvier 2025.
La conférence de presse se déroulera en présentiel uniquement. Une vidéo sera disponible ultérieurement sur le site internet de la Cour.
Chambre
Dans l’affaire Ioannides c. Chypre, la Cour a conclu à la non-violation du droit à la protection de la propriété à raison de la restriction de l’accès de la population au secteur de la zone tampon où se trouvait la maison de la requérante. En revanche, la Cour a conclu à la violation du droit à la protection de la propriété en raison du refus de Chypre de verser à la requérante un loyer en contrepartie de l’occupation de sa maison par les forces de maintien de la paix.
L'affaire concernait le grief de la requérante selon lequel la maison qu’elle possédait à Nicosie était occupée par les forces de maintien de la paix en dehors de tout paiement d’un loyer. Après l’invasion de Chypre par la Turquie, en 1974, la maison se retrouva située dans la zone tampon.
Dans l’affaire A.C. c. France, la Cour a conclu à la violation du droit au respect de la vie privée et à la non-violation du droit à un recours effectif combiné au droit au respect de la vie privée.
L’affaire concernait un ressortissant guinéen qui s’était déclaré mineur en situation d’isolement à son arrivée sur le territoire français et qui se plaignait de ne pas avoir bénéficié, en raison de la contestation de sa minorité par les autorités internes, de la prise en charge prévue par les dispositions liées à la protection de l’enfance en droit français.
La Cour a jugé que les autorités compétentes n’avaient pas agi avec la diligence raisonnable et qu’elles avaient manqué à leur obligation positive de garantir le droit du requérant au respect de sa vie privée. La Cour a jugé aussi que le requérant avait eu à sa disposition, en droit interne, des recours susceptibles de redresser la violation alléguée concernant le droit au respect de la vie privée, et qu’il devait être regardé comme ayant bénéficié, en pratique, au vu des circonstances de l’espèce, de recours effectifs. Elle en a conclu qu’il n’y avait pas eu violation du droit à un recours effectif combiné au droit au respect de la vie privée.
Dans l’affaire Petrović et autres c. Croatie, la Cour a conclu à la violation du droit au respect de la vie privée et familiale.
L’affaire concernait les soupçons de trois mères selon lesquels leurs nouveau-nés, nés entre 1986 et 1994, ne seraient pas tombés malades et décédés, contrairement aux allégations des hôpitaux publics concernés, mais auraient été enlevés et illégalement proposés à l’adoption. La Cour relève des similitudes entre cette affaire et l’affaire Zorica Jovanović c. Serbie.
La Cour a jugé que la Croatie avait manqué au devoir (« obligation positive continue ») concernant les allégations des requérantes selon lesquelles leurs bébés avaient été enlevés dans les maternités et illégalement proposés à l’adoption. La Cour a jugé également que des mesures générales au niveau national étaient requises en invitant la Croatie à mettre en place un mécanisme destiné à fournir un redressement individuel à tous les parents se trouvant dans une situation similaire. Ce mécanisme doit être supervisé par un organe indépendant doté des pouvoirs adéquats pour être en mesure d’apporter des réponses crédibles concernant le sort de chaque enfant et d’offrir une réparation appropriée le cas échéant.
Dans l’affaire F.D. et H.C. c. Portugal, la Cour a conclu à la violation du droit au respect de la vie privée et familiale.
L’affaire concernait l’exécution d’une demande de localisation émise par les autorités françaises dans le cadre d’un litige relatif à la garde de H.C., que son père F.D. avait déplacé de la France vers le Portugal, et sur la restitution subséquente de l’enfant à sa mère.
La Cour a jugé que ni le père ni le fils n’avaient été entendus par une juridiction portugaise avant que la décision tendant au retour de l’enfant ne soit prise, et que l’allégation selon laquelle l’enfant risquait d’être exposé à des mauvais traitements n’avait pas été examinée, ce qui s’analyse en une méconnaissance des droits procéduraux des intéressés. Les autorités portugaises ont ignoré les droits dont jouissait le requérant en tant que père de l’enfant, et elles n’ont pas tenu compte de la question de savoir s’il était dans l’intérêt supérieur de l’enfant de retourner auprès de sa mère. La Cour a jugé par ailleurs que les autorités avaient omis de protéger l’enfant lorsque celui-ci a été conduit à un poste de police et y a été gardé pendant l’arrestation de son père et que, dans l’ensemble, la décision n’était pas « nécessaire dans une société démocratique ».
Dans l’affaire Văleanu et autres c. Roumanie, la Cour a conclu à la violation de la protection de la propriété concernant toutes les requêtes n’ayant pas été rayées du rôle.
L’affaire concernait principalement la restitution de biens nationalisés par le régime communiste et l’inexécution prolongée des décisions de justice rendues en faveur des requérants, ainsi que l’absence de recours effectif à cet égard, l’annulation sans indemnisation des titres de propriété des requérants imputable à l’application incorrecte par l’État de la loi pertinente, et le manquement des autorités à accorder des indemnités raisonnablement en rapport avec la valeur actuelle des biens.
La Cour a accordé aux requérants une satisfaction équitable au titre du dommage matériel que ceux-ci ont subi à raison de l’impossibilité dans laquelle ils se sont trouvés d’obtenir la restitution de leurs biens.
- Communiqué de presse (en anglais)
- Communiqué de presse (en roumain)
Arrêts et décisions rendus
16/01/2025
14/01/2025
Grande Chambre
Le 16 décembre 2024, la Cour a décidé de rejeter la demande d’avis consultatif formulée par la Haute Cour de cassation et de justice de Roumanie.
La Haute Cour requérait de la CEDH qu’elle réponde à deux questions portant sur l’une sur l’application de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) et l’autre sur le niveau requis de précision de la loi interne ayant servi de base légale à la mesure de révocation. La Cour a décidé de ne pas accepter la demande d’avis consultatif, relevant qu’elle ne concernait pas une question de principe au sens de l’article 1 § 1 du Protocole n° 16 qui justifierait un examen par la Grande Chambre. Exposant un aperçu pertinent de sa jurisprudence à cet effet, la Cour démontre que la juridiction demanderesse dispose des moyens nécessaires pour garantir le respect des droits protégés par la Convention lorsqu’elle jugera le litige en instance. La Cour n’aperçoit pas de motifs qui nécessiteraient qu’elle précise davantage les principes existants.
La Cour a accepté le renvoi devant la Grande Chambre de l’affaire Yasak c. Türkiye.
L’affaire concernait les conditions de détention et la condamnation du requérant pour appartenance à l’organisation terroriste armée que les autorités turques désignent sous l’appellation organisation terroriste Fetullahiste / structure d’État parallèle.
La Cour a aussi décidé de rejeter six autres demandes de renvoi.
Audiences
La Cour a tenu une audience de Grande Chambre dans l’affaire Danileţ c. Roumanie.
L’affaire concerne une sanction disciplinaire imposée par le Conseil supérieur de la magistrature à un juge pour avoir publié deux messages sur son compte Facebook.
Décisions
La Cour a déclaré irrecevable la requête dans l’affaire Association confraternelle de la Presse Judiciaire et autres c. France.
Les requérants dans cette affaire allèguaient que la législation française relative aux techniques de recueil de renseignement aurait porté atteinte au droit au respect de la vie privée, au droit à la liberté d’expression ainsi qu’aux droits à un recours effectif et à un procès équitable.
La Cour a jugé que les requérants disposaient, au moment de l’introduction de leurs requêtes, d’un recours effectif devant le Conseil d’État et qu’il leur appartenait de l’épuiser en présentant les griefs tirés de la Convention qu’ils invoquaient devant la Cour. Elle a jugé par ailleurs que les requérants n’avaient pas établi, en l’espèce, l’existence de circonstances particulières les dispensant d’exercer ce recours.
La Cour a déclaré irrecevable la requête dans l’affaire Uçar c. Türkiye.
L’affaire concernait le commandant de l’un des quinze chars d’assaut déployés dans le cadre de la tentative de coup d’État militaire commise en Türkiye le 15 juillet 2016, qui, après ces événements, avait été jugé coupable de tentative de renversement de l’ordre constitutionnel et de dégradations.
La Cour a rejeté le grief du requérant consistant à dire que la procédure pénale dirigée contre lui n’avait pas été équitable. Elle a jugé qu’il n’y avait rien d’arbitraire ou de manifestement déraisonnable dans l’appréciation des juridictions turques, relevant que celles-ci avaient formulé leurs conclusions en s’appuyant sur différents éléments de preuve et après avoir procédé à une analyse détaillée non seulement des accusations portées contre le requérant mais aussi des arguments ou éléments qui pesaient en sa faveur.
- Communiqué de presse (en anglais uniquement)
La Cour a déclaré irrecevable la requête dans l’affaire Borzykh c. Ukraine.
L’affaire concernait l’interdiction du port du ruban de Saint-Georges (un symbole commémorant les morts de la guerre) en public.
En 2016, l’Ukraine a interdit la fabrication et l’utilisation de ce ruban à cause de son association avec le régime totalitaire soviétique et avec l’armée russe contemporaine. Le requérant est un ancien officier de l’armée qui souhaitait porter le ruban de Saint-Georges le Jour de la Victoire. Depuis l’occupation de la péninsule de Crimée par la Russie et le début des hostilités dans les régions de l’est de l’Ukraine, le coquelicot a été adopté comme symbole commémoratif dans le pays.
La Cour a jugé que la signification du ruban de Saint-Georges avait évolué dans le contexte du conflit armé en cours avec la Russie et que, même si l’interdiction déclarée par l’Ukraine a restreint la liberté d’expression, elle restait dans les limites de la latitude (« marge d’appréciation ») dont disposait l’État.
Communication d'affaires
La Cour a communiqué au gouvernement turc cinq affaires trouvant leur origine dans 1 000 autres requêtes.
Les requêtes concernent des condamnations pour appartenance à une organisation terroriste prononcées au motif que les intéressés auraient utilisé l’application de messagerie cryptée ByLock.
Les questions essentielles soulevées par les requérants ont déjà été tranchées par la Cour dans l’arrêt rendu par la Grande Chambre dans l’affaire Yüksel Yalçınkaya c. Türkiye. Il y a été souligné que plus de 8 000 requêtes concernant des griefs semblables étaient inscrites au rôle de la Cour. Les 1 000 requêtes apparemment comparables dont il est question ici constituent la quatrième série d'affaires communiquées au gouvernement turc. Dans ce contexte, la Cour a décidé de ne pas poser de questions aux parties et de ne pas les inviter à présenter des observations sur les requêtes.
Autres news
Le 10 janvier 2025, le président de la Cour, Marko Bošnjak, a assisté à l’audience solennelle de début d’année judiciaire de la Cour de cassation française à Paris. Il était accompagné de Mattias Guyomar, président de section et juge élu au titre de la France.
Le juge élu au titre de la Finlande, Juha Lavapuro, a formellement prêté serment dans la grande salle d'Audience de la CEDH.
Le 17 décembre 2024, Ingrid Derveaux, secrétaire générale du Réseau européen de formation judiciaire (REFJ), a effectué une visite à la Cour et a été reçue par le président Marko Bošnjak. Arnfinn Bårdsen, vice-président de la Cour, a également pris part à la rencontre.