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Prochaine audience dans une affaire interétatique
La Cour tiendra une audience de Grande Chambre dans l’affaire interétatique Ukraine c. Russie (Crimée) le 13 décembre 2023.
L’affaire concerne des allégations de l’Ukraine selon lesquelles la Fédération de Russie doit être tenue pour responsable d’un ensemble de violations de la Convention européenne (« pratique administrative ») en Crimée à partir de février 2014.
Chambre

Dans l’affaire Mariya Alekhina et autres c. Russie (n° 2), la Cour a conclu à la violation de la liberté d’association.
L’affaire concernait le refus des autorités russes d’enregistrer l’organisation de défense des droits humains des requérants qui avait pour but de fournir une assistance juridique aux détenus. La Cour a constaté globalement une absence de consignes détaillées sur les conditions formelles d’enregistrement des associations à but non lucratif et sur les conditions requises pour remplir les formulaires de demande. Elle en a conclu que les déficiences alléguées dans les justificatifs fournis par les requérants n’étaient pas suffisantes pour leur refuser l’enregistrement de leur organisation.

Dans l’affaire Tadić c. Croatie, la Cour a conclu à la non-violation du droit à un procès équitable.
L’affaire concernait une procédure pénale à l’issue de laquelle le requérant avait été condamné pour un complot visant, par le versement de sommes d’argent, à influencer la Cour suprême afin qu’elle rende une décision favorable à un homme politique de renom jugé pour crime de guerre. La Cour a jugé que l’implication du président de la Cour suprême dans le procès du requérant n’avait pas nui à l’impartialité objective de cette juridiction.

Dans l’affaire Associations de copropriété forestière Porceni Pleșa et Piciorul Bătrân Banciu (Obștea de Pădure Porceni Pleșa și Composesoratul Piciorul Bătrân Banciu) c. Roumanie, la Cour a conclu à la violation de la protection de la propriété.
L’affaire concernait deux associations propriétaires de forêts qui s’étaient plaintes de n’avoir pas obtenu de dédommagement, en dépit d’un droit reconnu par la loi, pour compenser l’impossibilité pour elles d’exploiter leurs forêts en raison du classement de celles-ci en zones naturelles protégées relevant du réseau européen Natura 2000.
La Cour a constaté qu’à ce jour, soit plus de dix ans après la décision de la Commission européenne favorable à l’octroi d’aides d’État à des personnes physiques ou morales possédant des forêts au sein des sites Natura 2000, le projet de décision contenant les normes méthodologiques pour l’octroi des aides compensatoires d’État n’avait toujours pas été publié et qu’aucun versement n’avait été réalisé en faveur de la première requérante pour l’année 2013, ni au profit de la seconde requérante pour la période allant de 2010 à 2014. Tout en étant frappées de l’interdiction légale d’exploiter leurs forêts en raison de leur classement en zone naturelle protégée, les associations requérantes ont assuré à leur frais, pendant ces périodes, leur entretien obligatoire.

Dans l’affaire Krachunova c. Bulgarie, la Cour a conclu à la violation de l’interdiction de l’esclavage et du travail forcé.
L’affaire concernait les démarches engagées par la requérante pour obtenir une indemnisation correspondant aux revenus de son travail sexuel lui ayant été soustraits par son proxénète. Les juridictions bulgares ont refusé de lui accorder une telle indemnisation au motif qu’elle s’était livrée à la prostitution et que lui restituer les gains issus de cette activité aurait été contraire aux « bonnes moeurs ».
La Cour a jugé que les États avaient l’obligation de permettre aux victimes de traite d’êtres humains de demander à la personne les ayant exploitées une indemnisation de la perte de revenus, et que les autorités bulgares avaient manqué à leur obligation de mettre en balance le droit de la requérante de former une telle demande, avec les intérêts de la collectivité, dont il est improbable qu’elle estime immoral le versement d’une indemnisation dans un tel cas de figure.
La CEDH reconnaît pour la première fois qu’une victime de traite a le droit de demander réparation de son dommage matériel de la part de la personne l’ayant exploitée.
Grande Chambre

La Cour se prononcera dans l’affaire de Grande Chambre Humpert et autres c. Allemagne le 14 décembre 2023.
L’affaire concerne les sanctions que les requérants, tous enseignants relevant du statut de fonctionnaire, se sont vu infliger pour avoir fait grève dans le but d’obtenir une amélioration de leurs conditions de travail.

Le 11 décembre 2023, un collège de 5 juges examinera les demandes de renvoi devant la Grande Chambre de deux affaires.
Décisions

La Cour a tenu une audience de Chambre dans l’affaire Karsai c. Hongrie.
La requête concerne le droit à la mort volontaire pour une personne atteinte de sclérose latérale amyotrophique (SLA), maladie qui touche les motoneurones. Compte tenu de la nature de l’affaire, la chambre a décidé de lui réserver un traitement prioritaire en vertu de l’article 41 du règlement de la Cour.
Décisions

La CEDH a déclaré irrecevable la requête dans l’affaire Gyulumyan et autres c. Arménie.
L’affaire concernait la cessation du mandat de juge à la Cour constitutionnelle des quatre requérants, intervenue en 2020 à la suite de modifications de la Constitution n’ayant pas fait l’objet d’un contrôle juridictionnel. Ces événements s’inscrivirent dans le cadre de la lutte contre la corruption menée par le gouvernement qui fut porté au pouvoir à l’issue de la « Révolution de velours ».
La Cour a jugé que même si la plainte des requérants porte sur un droit « défendable » au regard de la législation arménienne, à savoir leur droit d’exercer leur mandat jusqu’à la retraite, l’impossibilité qui leur a été faite d’accéder à un tribunal avait été justifiée par des motifs objectifs. En particulier, il a été mis fin à leur mandat par une révision constitutionnelle qui faisait partie d’une réforme plus générale et n’était pas dirigée spécifiquement contre eux.

La CEDH a déclaré irrecevable la requête dans l’affaire Sorasio et autres c. Italie.
L’affaire concernait l’occupation par l’Agence interrégionale du Pô, pour les besoins de la construction d’une digue, d’une partie des terres agricoles appartenant aux requérants sur la commune de Villanova Solaro, ainsi que les procédures juridictionnelles liées à cette occupation.
Constatant que l’État a reconnu en substance l’existence d’une violation des droits de propriété des requérants et leur a versé une indemnité appropriée, la Cour a conclu que les requérants ne peuvent plus se prétendre victimes d’une violation et rejette donc leurs requêtes.

La CEDH a déclaré irrecevable la requête dans l’affaire Asociación de Abogados Cristianos c. Espagne.
L’affaire concernait une œuvre d’art qui figurait parmi les œuvres présentées dans le cadre d’une exposition financée par les autorités locales de Pampelune. L’utilisation d’hosties consacrées dans l’œuvre fit un tollé et poussa l’association requérante à déposer une plainte pénale dirigée à la fois contre l’artiste et contre un conseiller municipal.
La Cour rejette le premier grief de l’association requérante, relatif au devoir de neutralité religieuse des autorités, car l’intéressée n’a pas épuisé les voies de recours disponibles au niveau interne à cet égard. En particulier, au lieu de déposer une plainte pénale, l’association aurait pu contester dans le cadre d’une procédure de contentieux administratif le refus des autorités locales d’annuler l’exposition. La Cour rejette, pour défaut manifeste de fondement, le deuxième grief de l’association, relatif au classement sans suite de sa plainte, car la conclusion des autorités judiciaires internes selon laquelle les actes litigieux n’étaient pas constitutifs d’une infraction pénale n’a rien d’arbitraire.

La CEDH a décidé de rayer du rôle les requêtes dans l’affaire Bryska c. Ukraine et 5 autres.
Aucun des formulaires de demande ne mentionne de moyen opérationnel de contacter les requérants autre qu’une adresse postale. Étant donné que la Cour n’a pas la possibilité d’envoyer de correspondance postale en Ukraine et que les requérants n’ont pas fourni d’adresse électronique opérationnelle, la Cour estime que ceux-ci n’entendent plus maintenir leurs requêtes.

La Cour a déclaré irrecevable la requête dans l’affaire Rivadulla Duró c. Espagne.
L’affaire concernait la condamnation et la peine d’emprisonnement infligées au requérant pour apologie publique du terrorisme, insulte et diffamation envers la Couronne, et insulte et diffamation envers les institutions de l’État, à raison du contenu de plusieurs messages diffusés sur les réseaux sociaux et d’une chanson sur le roi émérite Juan Carlos Ier d’Espagne.
Les juridictions nationales ont jugé le requérant coupable en tenant compte de la jurisprudence de la Cour européenne et ils ont mis en balance les intérêts en jeu, notamment son droit à la liberté d’expression. Les condamnations et les peines imposées n’étaient pas disproportionnées. La requête est globalement rejetée pour défaut manifeste de fondement. La Cour estime conforme à la Convention le rejet du recours d’amparo formé par le requérant.

La Cour s’est prononcé sur 21 requêtes dirigées contre la Norvège concernant des enfants qui étaient pris en charge par l’autorité publique. Elle a déclaré irrecevables douze requêtes tandis qu’elle a conclu à la violation du droit au respect de la vie privée et familiale dans neuf autres requêtes.
Ces affaires ont permis de dégager des principes directeurs concernant les questions qui se posent relativement aux enfants pris en charge par l’autorité publique. Notamment, les États jouissent d’une large marge d’appréciation lorsqu’il s’agit de décider si un enfant doit être pris en charge par l’autorité publique, mais la Cour doit procéder à un « contrôle plus strict » de toute mesure complémentaire adoptée, par exemple la restriction des droits de contact et de visite. L’adoption, en particulier, doit être justifiée par des « circonstances exceptionnelles » et par l’exigence primordiale que représente l’intérêt supérieur de l’enfant.

Dans l’affaire Lenis c. Grèce, la Cour déclare la requête irrecevable.
Le requérant était métropolite (équivalent d’un évêque) de Kalávryta et d’Égialée au sein de l’Église orthodoxe de Grèce. L’affaire porte sur sa publication d’un article homophobe sur son blog personnel en décembre 2015, alors que le Parlement grec s’apprêtait à débattre d’un projet de loi introduisant une union civile pour les couples homosexuels, ainsi que sur les poursuites et la condamnation pour incitation à la haine et à la discrimination dont il a fait l’objet par la suite.
La Cour a jugé que M. Lenis tentait de faire dévier la liberté d’expression de la Convention de sa finalité réelle en l’invoquant à des fins manifestement contraires aux valeurs que la Convention vise à promouvoir.
Autres news

Le 4 décembre 2023, la présidente Síofra O’Leary a assisté à la cérémonie de remise des Prix de la Faculté de Droit, de Sciences Politiques et de Gestion de l’université de Strasbourg, accompagnée de Mattias Guyomar, juge élu au titre de la France. Elle a prononcé un discours à cette occasion.

Le 1er décembre 2023, la Présidente Síofra O’Leary a participé à la conférence sur Les droits de l’homme en pratique: le rôle des droits de l’homme à l’occasion du 20e anniversaire de l’ECHR Act 2003, organisée par le Centre d’étude irlandais du droit de l’Union (ICEL), à Dublin (Irlande). Elle a prononcé un discours à cette occasion.